J’ai tout perdu pour une illusion : le prix amer de l’infidélité
— Camille, écoute-moi, je t’en supplie… Je suis désolé !
Ma voix tremblait, mes genoux heurtaient le parquet froid du salon. Camille se tenait devant moi, droite comme une statue, les bras croisés sur sa poitrine. Ses yeux, d’ordinaire si doux, étaient durs comme la pierre. Derrière elle, la lumière grise de Paris filtrait à travers les rideaux, rendant la pièce encore plus glaciale.
— Tu crois vraiment qu’on efface tout d’un simple pardon ? Tu m’as trahie, François. Tu as détruit notre famille.
Ses mots me frappaient plus fort que n’importe quelle gifle. Je n’avais jamais vu Camille aussi ferme. Nous nous étions connus à la fac de droit à Lyon. Elle était brillante, passionnée, et moi… j’étais fasciné par sa force tranquille. On avait traversé ensemble les années de galère, les petits boulots, les fins de mois difficiles dans notre studio sous les toits. On s’était mariés juste après nos diplômes, avec la certitude naïve que l’amour pouvait tout surmonter.
Mais la vie parisienne nous avait usés. Mon cabinet d’avocat me prenait tout mon temps. Camille avait mis sa carrière entre parenthèses pour s’occuper de nos deux enfants, Lucie et Paul. Je rentrais tard, épuisé, irritable. Les disputes étaient devenues notre quotidien.
C’est là qu’elle est entrée dans ma vie : Sophie, une jeune avocate du cabinet. Belle, vive, pleine d’admiration pour moi. Elle me faisait sentir important, désiré. J’ai cru revivre. J’ai cru que je méritais mieux que cette routine étouffante.
Un soir, alors que Camille dormait déjà, j’ai reçu un message de Sophie : « J’ai envie de toi. » J’ai hésité… puis j’ai cédé. Une fois, puis deux, puis cent fois. Je me suis inventé des excuses : « Camille ne me comprend plus », « Je suis malheureux », « J’ai droit au bonheur ». Je me suis convaincu que je n’étais pas le seul responsable.
Mais la vérité a éclaté un soir d’hiver. Camille a trouvé un message sur mon téléphone. Elle n’a pas crié. Elle n’a pas pleuré. Elle m’a simplement dit :
— Pars.
Je suis parti. J’ai cru que c’était temporaire, que je reviendrais vite. Mais Camille a tenu bon. Elle a refusé toutes mes tentatives de réconciliation.
Chez Sophie, tout était différent… au début. Les premiers mois ressemblaient à une lune de miel clandestine : dîners dans des restaurants chics du Marais, week-ends à Deauville, nuits blanches à refaire le monde. Mais très vite, la réalité m’a rattrapé. Sophie voulait un enfant, un engagement total. Elle ne comprenait pas mes silences quand je pensais à Lucie et Paul. Elle se vexait quand je refusais de vendre la maison familiale.
Un soir, alors que je rentrais chez Sophie après avoir vu mes enfants dans un café — Camille refusait que je vienne chez elle — j’ai craqué.
— Je ne peux pas continuer comme ça…
— Tu regrettes ? Tu veux retourner vers ta petite vie bien rangée ?
Sophie me regardait avec mépris. Je n’avais plus rien à lui offrir. Ni passion, ni avenir.
J’ai supplié Camille de me reprendre. J’ai écrit des lettres, envoyé des fleurs, attendu des heures devant sa porte.
— Papa, pourquoi tu ne rentres pas à la maison ?
La voix de Lucie au téléphone me brisait le cœur.
— C’est compliqué, ma chérie… Mais je t’aime très fort.
Camille ne m’a jamais insulté devant les enfants. Elle a gardé sa dignité jusqu’au bout. Mais elle ne m’a jamais pardonné.
Aujourd’hui, je vis seul dans un petit appartement du 15e arrondissement. Mes collègues me regardent avec pitié ou indifférence. Mes parents ne comprennent pas comment j’ai pu tout gâcher pour une histoire sans lendemain.
Parfois, je croise Camille au marché du quartier. Elle marche la tête haute, Lucie et Paul à ses côtés. Elle a l’air fatiguée mais sereine. Moi, je détourne les yeux.
Je repense à toutes ces années où nous étions heureux malgré les difficultés : nos promenades sur les quais de Saône à Lyon, nos vacances en Bretagne chez ses parents, les soirées à refaire le monde autour d’un verre de vin rouge… Tout ça pour quoi ? Pour une illusion de bonheur facile ?
Je voudrais lui dire que je l’aime encore, que j’ai compris trop tard la valeur de ce qu’on avait construit ensemble. Mais il est trop tard.
Est-ce qu’on mérite vraiment une seconde chance après avoir trahi ceux qui nous aiment ? Peut-on réparer ce qu’on a brisé ?
Et vous… auriez-vous pardonné ?