À cette soirée, j’ai rencontré Zoé et failli tout perdre : comment j’ai sauvé mon mariage
— Tu rentres encore tard, Bastien ?
La voix de Camille résonne dans le couloir, sèche, tranchante. Je claque la porte derrière moi, le cœur battant. Je sens déjà la tension dans l’air, comme une tempête prête à éclater. Je pose mon sac, j’hésite à répondre. Je sais qu’elle a raison. Depuis quelques semaines, je rentre de plus en plus tard. Depuis cette fameuse soirée chez Paul.
C’était un vendredi soir, dans un appartement du 11ème arrondissement. Paul, un collègue de l’agence de pub où je travaille, fêtait sa promotion. J’y suis allé sans grande envie, fatigué par la semaine, mais Camille m’avait encouragé : « Sors un peu, ça te fera du bien. » Si seulement elle savait…
J’étais accoudé au balcon, une bière à la main, quand Zoé est arrivée. Elle portait une robe rouge éclatante, ses cheveux bruns attachés en un chignon désordonné. Elle riait fort, sans gêne, comme si le monde lui appartenait. Paul nous a présentés :
— Bastien, voici Zoé, ma cousine. Elle vient d’emménager à Paris.
Elle m’a tendu la main, son regard planté dans le mien. J’ai senti un frisson me traverser. On a parlé toute la soirée. De tout, de rien. De nos rêves d’ados, de nos galères de boulot, de cette ville qui nous écrase parfois. Je n’avais pas ressenti ça depuis longtemps : cette légèreté, cette excitation.
Les jours suivants, Zoé m’a écrit. Un message anodin d’abord : « Tu connais un bon resto dans le Marais ? » Puis d’autres. On s’est revus. Un café, puis deux. Je me suis surpris à attendre ses messages plus que ceux de Camille. J’ai commencé à mentir : « Je dois finir un dossier », « J’ai une réunion tardive »…
Camille n’est pas dupe. Elle voit mes regards fuyants, mes silences au dîner, mon téléphone que je garde toujours près de moi. Un soir, elle explose :
— Tu me caches quelque chose ?
Je nie, bien sûr. Mais elle insiste. Les disputes deviennent quotidiennes. Notre fille, Léa, 8 ans, se réfugie dans sa chambre dès qu’on hausse le ton.
Un soir d’orage, alors que Camille pleure dans la cuisine et que Léa s’endort les oreilles bouchées sous son oreiller, je reçois un message de Zoé : « Viens me voir. » J’y vais sans réfléchir.
Chez elle, tout est différent : l’odeur du thé à la menthe, les coussins colorés jetés sur le canapé, la musique douce en fond sonore. Zoé me regarde avec tendresse.
— Tu n’es pas heureux avec elle ?
Je ne sais pas quoi répondre. Je me sens lâche. Je me laisse embrasser.
Le lendemain matin, je me réveille dans son lit. Je regarde le plafond fissuré et je comprends que je viens de franchir une ligne invisible.
Je rentre chez moi à l’aube. Camille est assise sur le canapé, les yeux rouges.
— Tu étais où ?
Je mens encore. Elle ne dit rien mais je sens qu’elle sait.
Les jours passent. Je vis entre deux mondes : celui de Zoé où tout semble facile et léger ; celui de Camille où tout s’effondre lentement. Léa ne me parle plus.
Un soir, Camille me tend mon téléphone :
— J’ai vu tes messages avec Zoé.
Le sol se dérobe sous mes pieds. Elle pleure en silence.
— Pourquoi tu m’as fait ça ? On avait tout…
Je n’ai pas de réponse. Je m’effondre à genoux devant elle.
— Pardonne-moi… Je t’en supplie…
Elle ne répond pas tout de suite. Les jours suivants sont un enfer : silence glacial à la maison, regards fuyants à l’école quand j’accompagne Léa. Ma mère m’appelle :
— Bastien, tu vas tout gâcher pour une histoire sans lendemain ? Pense à ta fille !
Je coupe mon téléphone. Je ne veux plus entendre personne.
Zoé continue de m’écrire mais je ne réponds plus. Je réalise que ce que je ressens pour elle n’est qu’un mirage — une fuite devant mes propres failles.
Un matin pluvieux de novembre, Camille me dit :
— Si tu veux vraiment qu’on s’en sorte, il faut qu’on parle. Vraiment.
On s’assoit dans la cuisine, autour d’un café froid. Elle me regarde droit dans les yeux :
— Pourquoi tu es parti ? Qu’est-ce qui te manque avec moi ?
Je pleure enfin. Je lui dis tout : la routine qui m’étouffe, la peur de vieillir sans passion, le besoin d’exister ailleurs qu’à travers mon rôle de père et de mari.
Camille écoute sans juger. Elle pleure aussi.
On décide d’aller voir un conseiller conjugal. Les séances sont douloureuses mais peu à peu on réapprend à se parler. À se toucher timidement le matin en se croisant dans le couloir. À rire ensemble devant un film nul.
Zoé disparaît de ma vie comme elle y est entrée : soudainement.
Aujourd’hui encore je repense à cette soirée chez Paul et à tout ce que j’ai failli perdre pour une illusion.
Est-ce que l’amour peut vraiment renaître après une trahison ? Est-ce qu’on peut se pardonner soi-même ? Qu’en pensez-vous ?