Sept Nuits Sans Sommeil : Quand Mon Mari a Disparu et Que Ma Mère a Dit Qu’il Était Brisé

« Tu ne comprends donc rien, Camille ? » La voix de ma mère résonne encore dans la cuisine, tranchante comme un couteau. Je serre la tasse de café entre mes mains tremblantes, les yeux rougis par la fatigue. Sept nuits sans sommeil, sept nuits à attendre un signe de Paul, mon mari. Rien. Pas un message, pas un appel. Juste le vide.

Ma fille, Léa, dort enfin dans sa chambre, après avoir pleuré toute la soirée. Elle réclame son père, elle ne comprend pas pourquoi il n’est plus là. Moi non plus, à vrai dire. Tout a basculé il y a une semaine, un soir banal où la tension est montée d’un cran de trop.

« Tu ne fais jamais attention à moi ! » ai-je crié, épuisée par les journées à courir entre le travail et la maison. Paul s’est levé brusquement de table, sa fourchette encore à la main. « Et toi, tu crois que c’est facile ? Tu crois que j’en peux plus ? »

Le ton est monté, Léa s’est mise à pleurer. J’ai voulu la consoler mais Paul a claqué la porte de la chambre. Je l’ai entendu sangloter, chose rare chez lui. Le lendemain matin, il n’était plus là. Juste un mot griffonné sur le frigo : « Je vais chez mes parents. J’ai besoin de temps. »

Depuis, le silence. Ma mère est venue m’aider avec Léa, mais son soutien est empoisonné par ses jugements. « Il n’a jamais été solide, tu le savais bien », répète-t-elle en rangeant la vaisselle. « Il est brisé, Camille. Il ne reviendra pas comme avant. »

Je me sens coupable et en colère à la fois. Est-ce moi qui l’ai poussé à bout ? Ou bien est-ce lui qui refuse d’affronter ses responsabilités ? Les nuits sont longues, peuplées de souvenirs et de regrets. Je repense à notre rencontre à la fac de Lyon, à nos rêves de famille parfaite dans notre petit appartement de Villeurbanne.

Mais la réalité nous a rattrapés : le stress du boulot, les factures qui s’accumulent, les nuits blanches avec Léa bébé… Paul a changé. Il s’est replié sur lui-même, silencieux, absent même quand il était là.

Un soir, j’ai craqué. J’ai appelé sa mère, Madame Dupuis. Sa voix était froide : « Paul a besoin de repos. Il dort beaucoup. Il ne veut voir personne pour l’instant. »

J’ai raccroché en larmes. Comment peut-il m’abandonner ainsi ? Comment peut-il laisser Léa sans nouvelles ?

Ma mère soupire en me voyant pleurer : « Tu dois être forte pour ta fille. Les hommes ne savent pas gérer la pression comme nous. »

Mais je refuse d’accepter cette fatalité. J’ai besoin de comprendre ce qui s’est passé dans la tête de Paul. Est-ce une dépression ? Un burn-out ? Ou simplement une fuite lâche devant les difficultés ?

Les jours passent et je m’épuise à tenir le cap pour Léa. Je fais semblant d’aller bien devant elle, mais dès qu’elle dort, je m’effondre sur le canapé.

Un soir, alors que je rangeais les jouets dans le salon, mon téléphone a vibré. Un message de Paul : « Je suis désolé. Je n’arrive plus à dormir non plus. Je me sens vide. Je ne sais pas si je peux revenir. »

J’ai relu ces mots cent fois. Ma mère les a lus aussi et a haussé les épaules : « Tu vois ? Il est brisé. »

Mais moi, je refuse d’abandonner sans comprendre. J’ai répondu : « On doit parler, Paul. Pour Léa, pour nous. »

Il n’a pas répondu tout de suite. Deux jours plus tard, il m’a appelée en pleine nuit.

« Camille… Je suis désolé… Je crois que j’ai tout raté… Je ne sais plus comment être un bon père… ou un bon mari… »

Sa voix était rauque, pleine de larmes retenues.

« Paul, on est deux dans cette galère… Tu crois que c’est facile pour moi ? Mais on doit se battre ensemble… Pas chacun de notre côté… »

Un silence lourd a suivi.

« J’ai peur de revenir… J’ai peur de tout recommencer et d’échouer encore… »

J’ai senti ma colère retomber d’un coup.

« On a le droit d’avoir peur… Mais Léa a besoin de nous deux… Et moi aussi… »

Depuis cet appel, rien n’est réglé mais au moins il y a une brèche dans le mur du silence.

Aujourd’hui encore, je ne sais pas si Paul reviendra vraiment ou s’il restera chez ses parents à se reconstruire loin de nous.

Mais je me pose cette question : est-ce que l’amour suffit quand tout s’effondre autour de nous ? Est-ce qu’on peut vraiment réparer quelqu’un qui se sent brisé ? Qu’en pensez-vous ?