Espoir brisé, espoir retrouvé : Le combat de Claire pour devenir mère
« Tu crois vraiment qu’à ton âge, c’est raisonnable ? » La voix de ma mère résonne encore dans la cuisine, tranchante comme une lame. Je serre la tasse de café entre mes mains tremblantes, cherchant un peu de chaleur dans cette matinée glaciale de janvier à Lyon. Mon père, assis en face, évite mon regard. Il remue son sucre, l’air absent, comme s’il voulait disparaître. Je sens mes joues brûler de honte et de colère. J’ai 38 ans, je suis mariée depuis six ans avec Antoine, et je veux un enfant plus que tout. Mais mon corps me trahit, mois après mois, test après test.
« Claire, tu devrais penser à autre chose. Il y a d’autres façons d’être heureuse, tu sais… » ajoute ma mère, la voix soudain douce, presque compatissante. Mais je n’entends que le reproche, la déception. Je me lève brusquement, la chaise grince sur le carrelage. « Je ne peux pas abandonner. Pas encore. »
Dehors, la pluie martèle les vitres. Je marche vite, le cœur battant, les larmes menaçant de couler. Antoine m’attend à la maison. Il est mon roc, mais parfois, je sens qu’il fatigue aussi. Les rendez-vous à l’hôpital Édouard-Herriot, les examens, les piqûres, les hormones… tout cela pèse sur notre couple. Parfois, la nuit, je l’entends soupirer dans le noir. « On y arrivera, Claire. » Mais sa voix manque de conviction.
Un soir, après un énième test négatif, je m’effondre sur le carrelage froid de la salle de bain. Je pleure, je crie, je supplie Dieu. « Pourquoi moi ? Pourquoi nous ? » Je n’ai jamais été très croyante, mais ce soir-là, je prie comme jamais. Je promets d’être meilleure, d’aimer plus fort, de ne jamais perdre espoir. C’est ridicule, peut-être. Mais ça me donne la force de me relever.
Le lendemain, je décide d’aller à la basilique de Fourvière. Je monte les marches, chaque pas est une prière. À l’intérieur, l’odeur de cire et de pierre me calme. Je m’assois, ferme les yeux. « Donne-moi la force d’accepter. » Une vieille dame s’approche, pose sa main sur mon épaule. « Vous n’êtes pas seule, ma fille. » Son regard est doux, plein de compassion. Je souris à travers mes larmes. Peut-être que la foi, ce n’est pas seulement croire en Dieu, mais croire que la vie peut encore nous surprendre.
Les semaines passent. Antoine et moi décidons de tenter une dernière FIV. L’attente est insupportable. Ma sœur, Julie, m’appelle souvent. Elle a deux enfants, elle ne comprend pas toujours, mais elle essaie. « Tu sais, Claire, maman a peur pour toi. Elle ne veut pas te voir souffrir. » Je soupire. « J’ai besoin que vous croyiez en moi. Juste ça. »
Le jour du résultat, je suis seule. Antoine est en déplacement à Paris. Je regarde le téléphone, les mains moites. Un numéro inconnu s’affiche. « Madame Martin ? » La voix de la secrétaire tremble. « Félicitations, c’est positif. » Je n’y crois pas. Je tombe à genoux, je ris, je pleure. Je remercie Dieu, la vie, le hasard, tout ce qui a rendu ce miracle possible.
Quand Antoine rentre, je lui saute dans les bras. Il pleure aussi, pour la première fois depuis des années. Nous appelons mes parents. Ma mère ne dit rien au début, puis sa voix se brise : « Je suis fière de toi, ma fille. »
La grossesse n’est pas facile. Je suis alitée les trois derniers mois. Antoine s’occupe de tout, il me lit des histoires, il chante pour le bébé. Parfois, la peur me serre le ventre : et si tout s’arrêtait ? Mais je prie, chaque soir. Je remercie pour chaque jour de plus.
Le 14 juillet, à l’aube, notre fille Camille naît. Elle est minuscule, mais elle respire, elle crie, elle vit. Je la serre contre moi, je pleure encore. Ma mère entre dans la chambre, elle me prend la main. « Tu as eu raison d’y croire. »
Aujourd’hui, Camille a trois ans. Elle court dans le jardin, elle rit, elle tombe, elle se relève. Parfois, je la regarde et je me demande : qu’aurais-je fait si j’avais abandonné ? Si j’avais écouté la peur, le doute, les autres ?
Et vous, jusqu’où seriez-vous prêts à aller pour réaliser votre rêve ? Est-ce que la foi peut vraiment déplacer des montagnes, ou est-ce simplement le courage de ne jamais renoncer ?